Otages de Nina Bouraoui

La plupart d’entre nous ont un jardin secret. Une part de nous-même que nous gardons enfuie. Des épreuves du passé nous marquant à jamais de l’une ou l’autre cicatrice.

Et si un jour, ce secret tant gardé ne pouvait qu’exulter? Si son garde-fou, sa soupape ou son voile protecteur volait là devant vous, devant eux, en mille éclaboussures ?

Il suffira d’un cri, il suffira d’un souffle. D’un acte sans retour pour dévier la trajectoire qu’est la vôtre.

Qu’est ici la sienne. Celle de Sylvie. Qui ne peut plus se taire, qui ne peut plus paraître, mais qui au contraire pour une fois, pour une fois seulement, choisira d’être. D’être tout simplement. Qu’importe les conséquences, puisque là est sa place…

Un roman qui m’a prise et éprise, en une fois uniquement. En deux heures seulement.

J’ai adoré !

Anne So

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Anaïs Nin: sur la mer des mensonges de Léonie Bischoff

L’autrice Léonie Bischoff met à l’honneur dans son roman graphique un portrait de femme, celui de la diariste Anais Nin. Le parti pris est de se concentrer sur les années 30, période fondatrice de sa vie. Elle rencontre l’auteur Henry Miller, elle essaie de s’accomplir comme auteure et s’affirme en tant que femme précurseure du polyamour.

La dualité du personnage est fort bien rendue tout au long des planches : la jeune femme de la bonne société à la coiffure sage et le double, immergé sous la mer, qui ouvre son journal ressemble à une déesse grecque à la longue chevelure. L’intérêt d’Anaïs Nin pour la psychanalyse s’y ressent parfaitement.
Ce livre imprimé sur papier épais est une véritable œuvre d’art. Léonie Bischoff propose un magnifique travail sur les couleurs, toutes en nuances et avec une grande finesse dans le trait. Cela rend très bien la poésie mais aussi l’expression de la sexualité qu’on retrouve dans l’ œuvre d’Anaïs Nin.
L’album vient d’obtenir le Prix public-France Télévisions au Festival international de bande dessinée de Angoulême… et c’est bien mérité !

Katia

Une pépite de cet été 2020 ! Cette BD est en effet un petit bonheur tant du point de vue de ses illustrations, que de son écriture et surtout de son sujet !
On y partage au début des années 30, un petit bout de vie de l’auteur Anaïs Nin. Cette romancière, pionnière de la littérature érotique et passionnée de psychanalyse, est une femme à la vie extraordinaire !
Nous la découvrons d’abord jeune épouse, un peu coincée dans cette existence qui la muselle. Son univers est trop étroit et son mari l’ennuie. Sa vie ondule de voyages en déménagements et d’une langue à l’autre.
Mais une rencontre va tout changer! Sa vie prend des couleurs et un vent de liberté souffle enfin sans relâche !

Multipliant les conquêtes amoureuses et prônant le polyamour sans embarras, elle a été la maîtresse de bien des écrivains ! Anaïs s’égare, Anaïs se cherche, Anaïs se comprend. La voici femme indépendante qui mène sa barque toutes voiles dehors !
Une petite révolution personnelle et féminine est en marche et on est très heureux d’en être les témoins.

Anne So

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À mains nues de Leïla Slimani et Clément Oubrerie

Ce roman graphique nous fait découvrir la vie de Suzanne Noël, « féministe engagée pour le droit de vote des femmes et pionnière de la chirurgie esthétique. » Elle a à cœur de permettre à ses patients de retrouver une humanité perdue. Pendant la guerre 14-18, elle répare les gueules cassées aux côté du professeur Hippolyte Morestin.

Suzanne Noël ne recule devant aucune bataille. Presque seule médecin femme en ce début de XXè siècle à Paris, elle doit se faire une place dans un monde d’hommes. En outre, elle se spécialise dans la chirurgie plastique, discipline qui n’est qu’à ses balbutiements. Elle devra se montrer persévérante pour obtenir la reconnaissance de son travail de chirurgienne esthétique.

Suzanne Noël a un grand intérêt pour l’art. Le rapprochement entre la médecine et sa passion m’a fort intéressé. Cela donne d’ailleurs des planches de Clément Oubrerie très réussies graphiquement.
Leila Slimani au scénario et Clément Oubrerie, un vrai régal ! Impatiente de lire le volume 2 !

Katia

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Le Cavalier suédois de Leo Perutz

Dans l’Europe orientale au début du XVIIIe siècle, aux confins de la Prusse et de la Pologne, le jeune roi Charles XII de Suède rêve de se tailler un empire qui irait de la Baltique à la mer Noire… et y réussit presque. Deux hommes en fuite parcourent les routes enneigées de Silésie. L’un d’eux est un voleur, Piège-à-poules, l’autre un aristocrate déserteur de l’armée suédoise. A bout de force, ce dernier suggère au voleur de se rendre dans un village proche où vit un de ses cousins fortunés et d’en rapporter subsistance et vêtements. Son compagnon découvre une propriété en ruine. Séduit par la beauté de la jeune maîtresse de maison, il monte un plan machiavélique et décide de prendre l’identité du noble. Et c’est son histoire qui nous est contée : poursuite endiablée d’un bonheur qui toujours échappe, jusqu’à la chute finale, attendue et d’autant mieux pathétique, où la Mort reprend ironiquement ses droits.

Perutz considérait Le Cavalier suédois comme son roman le plus inspiré. Servi par une langue superbe, le roman oscille entre le picaresque et le fantastique. Les péripéties s’enchaînent avec une logique imparable et cependant le ciel et l’enfer s’emparent du récit plongeant le lecteur dans une atmosphère onirique. Comme dans le fascinant Maître du Jugement dernier, l’auteur met en scène des personnages liés par un pacte à des Forces surnaturelles et malfaisantes qui stoppent leurs entreprises. Le Destin entraîne dans une danse mortelle nobles, roturiers ou bandits, hantés par des rêves de gloire et de fortune.

Mimi

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Dérive sanglante de William G. Tapply

Stoney Calhoun est guide de pêche dans un coin perdu du Maine. Il s’est réveillé il y a cinq ans dans une chambre d’hôpital. souffrant d’amnésie après 18 mois d’hospitalisation suite à un coup de foudre Il lui reste juste des images, voire des hallucinations, qui lui traversent l’esprit et des cauchemars qui animent son sommeil. Il ignore pourquoi des inconnus lui versent régulièrement une rente, sous la surveillance du mystérieux Homme au Costume qui vient le voir régulièrement pour s’assurer que la mémoire ne lui revient pas. A sa sortie de l’hôpital, Calhoun s’est installé dans un village reculé et s’est construit une cabane au fond des bois. Il mène une vie tranquille faite de contemplation de la nature, de pêche, avec son chien Ralph, personnage bien sympathique. Il a trouvé un petit boulot dans la boutique d’articles de pêche de Kate, où il est à la fois guide et amant à temps partiel. Ce quotidien est brisé le jour où son collègue et ami, Lyle disparaît alors qu’il accompagnait un client que Calhoun aurait dû lui-même prendre en charge. Calhoun retrouve le cadavre de son ami quelques jours plus tard dans un étang, avec du plomb dans le ventre, ce qui – il faut le reconnaître – est une drôle de façon de pêcher la truite. Taraudé par la culpabilité, il va tout faire pour retrouver la trace du client au péril même de sa vie…

Le récit va se dérouler sur deux plans : Calhoun va chercher à élucider le mystère de l’assassinat de Lyle (une fois les truites mises hors de cause), et tenter de retrouver son passé, effacé de sa mémoire depuis son long coma hospitalier, mais qui resurgit par flashs et se réveille peu à peu.

William G. Tapply dévoile ici et là quelques éléments, rendant ce personnage attachant et sensible, mais aussi secret. Autour de lui, une galerie de personnages bien campés, que ce soit la sublime Kate, sa maîtresse, Lyle, son meilleur ami ou encore le shérif Dickman qui semble vouloir garder un oeil sur lui et surtout Ralph, le chien. L’auteur prend son temps, décrivant aussi bien la nature environnante que les techniques de pêche. A priori, la pêche ne m’intéresse vraiment pas, mais j’ai pris plaisir à la description de différentes mouches et à leur fabrication. Ce roman est assez addictif, et heureusement, il y a en trois, tout aussi intéressants : Dérive sanglante, Casco Bay et Dark Tiger.
Un bémol toutefois, l’auteur est mort avant d’avoir pu nous révéler tous les secrets de Calhoun, snif. Mais que cela ne vous empêche surtout pas de faire un bout de chemin avec lui, le long des tranquilles rivières du Maine.

Mimi

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Mes ruptures avec Laura Dean de Mariko Tamaki et Rosemary Valero-O’connell

Un roman graphique qui nous parle du premier amour, de ses ruptures et de ses désillusions. Mais pas seulement ! C’est aussi une fresque sur l’amitié, la vie, les relations familiales et une ode à l’amour où le genre importe peu.

Ses illustrations sur 3 tons et son écriture délicate, fine et sensible, nous offre une bande dessinée plus que réussie et dans laquelle on aimera se plonger des heures durant.

Anne So

Les premiers jours avec Laura Dean sont faits de bonheur à l’état pur pour Freddy. Malheureusement, petit à petit la relation devient de plus en plus éprouvante pour elle. Laura Dean est lunatique et rompt avec elle pour toujours revenir. Et Freddy l’accueille à chaque fois les bras ouverts. Évidemment, elle se rend compte que ce n’est pas normal d’être aussi mal traitée par celle qu’elle aime pour au final ne récolter que de toutes petites particules de bonheur. Mais comment faire pour sortir de l’influence de Laura Dean, celle qui fait battre son coeur aussi fort et couler ses larmes tout aussi fort?

Bien que cela se passe dans un lycée, cette histoire est universelle et démontre bien que les relations toxiques peuvent se retrouver sous n’importe quelle forme.
La collaboration de Mariko Tamaki et Rosemary Valero-O’Connell est particulièrement réussie avec un scénario dans lequel tout le monde peut se reconnaître et des illustrations qui passent très intelligemment des grandes cases aux petites et du très détaillé à l’épuré.
Gros coup de coeur général auprès des bibliothécaires, il est recommandé aussi bien pour les ados que les adultes.

Judith

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Boule de feu d’Anouk Ricard et Étienne Chaize

En cette période maussade, je vous propose aujourd’hui la lecture d’une bande dessinée délurée, à l’univers psychédélique et aux protagonistes plus farfelus les uns que les autres ! Je ne suis pas sûre que de porter des lunettes de soleil suffise à vous protéger des couleurs déjantées et des vitamines qui se dégagent de cette histoire ! Vous vous retrouverez quoi qu’il arrive en plein trip, sans avoir recours à de quelconques substances illicites, au cœur d’une histoire rocambolesque et foisonnante à l’humour savoureusement absurde !

J’ai adoré ! Sacré voyage !

Anne So

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Omni-visibilis de Matthieu Bonhomme et Lewis Thondheim

Ou quand une sorte de Truman Show s’abat sur un homme sans histoire !
Trentenaire, hypocondriaque sur les bords, héros de cette affaire, personne n’aurait pu s’attendre à un tel tsunami humain et médiatique ! Encore moins lui !
Il vous habite par télépathie et vous retransmet tout ce qu’il ressent à travers ses cinq sens. Quelle drôle d’expérience ! Enfin plutôt effrayante et déconcertante que drôle pour lui, il faut le reconnaître.

Auriez-vous tenu le choc ? Cette si soudaine célébrité vous aurait-elle comblée ou au contraire fait prendre vos jambes à votre cou ?

Une Bande dessinée qui se lit d’une traite et qui sait nous tenir en haleine ! Des illustrations en deux tons, génialissimes !

Anne So

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La nuit est mon royaume de Claire Fauvel

Une fresque sur l’amitié et les desseins de deux jeunes filles, à qui l’on a dit que leurs rêves étaient trop grands. Issues d’un milieu social précaire, tout sera défi. Mais c’était sans compter sur leur courage et la force de leur jeunesse ! Certaines choses finiront peut-être par se réaliser…

Une période complexe du passage de l’adolescence à l’âge adulte, des envols qui ne se ressembleront pas, mais dont l’amitié se fera capitaine pour garder le cap ! Et la musique en fond sonore de A à Z! Une BD Rock and Roll superbement illustrée qui fait du bien !

Anne So

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Une touche de couleur de Jarrett J. Krosoczka

Jusqu’à ses 6 ans, Jarrett vivait avec juste avec sa mère. Il sentait bien que la situation n’était pas normal avec toutes ses personnes qui circulaient de jour comme de nuit. Un jour, il est recueilli par ses grands-parents et n’a aucune idée d’où se trouve sa mère, ni qui est son père. Entre sa grand-mère acariâtre, son grand-père au grand coeur et ses oncles et tantes de passage, il est bien entouré mais il lui faut des années pour avoir des réponses à ses questions et comprendre son enfance.

Alors que Jarrett nous raconte sa vie, rien n’est noir ou blanc, tout est en nuance de gris avec une touche de couleur orange. La narration d’un point de vue de l’auteur enfant et adolescent est ponctuée de commentaire de l’adulte qu’il est devenu avec le recul que la compréhension et la maturité lui a apporté.
Malgré l’épaisseur de ce roman graphique, on le lit d’une traite et à la fin, on a l’impression de s’être fait un ami.

Judith

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Le pays des autres de Leïla Slimani

L’histoire se déroule au Maroc, dans les années cinquante.

Mathilde, une jeune Alsacienne, a fait un mariage d’amour avec Amin, spahi marocain venu se battre pour la France pendant la seconde guerre mondiale.
Elle, qui rêvait d’aventure, se retrouve en plein bled, dans une misérable ferme, aux côtés d’un mari épuisé et assombri par la tâche qu’il a entreprise, la culture d’une terre aride.
Son identité de Française pauvre l’isole dans le milieu des colons, mais aussi parmi les indigènes.
Son quotidien est fait de travail harassant pour gérer la vie de la ferme et élever ses deux enfants. Elle trouve peu de soutien auprès de son mari, amer et autoritaire.
Pourtant Amin est aussi un homme porté par ses valeurs de travail, d’honneur et son sens de la famille.

Enfin, l’autrice campe avec grande finesse et vérité le personnage d’Aïcha, la brillante et secrète enfant du couple. Elle étudie dans une école de religieuses où elle est la seule non blanche.
Le roman de Leila Slimani nous plonge dans l’histoire personnelle d’une famille, mais aussi dans l’Histoire de la décolonisation.
Un livre d’une grande subtilité psychologique, passionnant et émouvant…Comme moi, vous le dévorerez….

Katia

Après son roman « Chanson douce » que j’avais adoré, Leïla Slimani nous revient cette année avec « Le pays des autres ». Un superbe roman, qui nous offre comme confidente, sa narratrice. Mathilde. Une jeune alsacienne qui, par amour, va choisir de suivre son homme, dans son pays d’origine, le Maroc. Lui y retrouvera ses racines et tentera d’y construire leur futur.

Mais qu’est ce que cette décision et cette preuve d’amour vont apporter à Mathilde ? Quel est cet avenir qui l’attend au Maroc, et quelle place pourra t’elle se faire au sein de cette terre dont elle ne connaît encore rien et dont elle a tout à apprendre ?

Un roman qui m’a fait voyager, doux et terrible à la fois. Le destin d’une femme au creux de nos mains, contenu dans toutes ces pages. Et les questions qui se posent, les « et si j’avais… », les choix qui influent toute une vie et les images que l’ont rebobinent à plusieurs reprises pour en comprendre le fil.

Anne So

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Fille de Camille Laurens

FILLE, nom féminin
1. Personne de sexe féminin considérée par rapport à son père, à sa mère.
2. Enfant de sexe féminin.
3. (Vieilli.) Femme non mariée.
4. Prostituée.

La quatrième de couverture nous en dit déjà long sur le contenu du nouveau roman de Camille Laurens.

L’auteure suit ici l’enfance puis l’adolescence de Laurence Barraqué dans les années 1960 à Rouen, qui tente de trouver sa place dans un monde d’hommes. Dans les années 90, Laurence devient mère à son tour, d’une fille, Alice après qu’elle a perdu dès l’accouchement, son premier né, un garçon. Se posent alors les questions de la transmission, du statut de la femme qui a évolué même s’il n’est pas encore égal à celui de l’homme.

Camille Laurens nous livre un roman militant, tout en finesse, avec émotion et humour.

Katia

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Nature humaine de Serge Joncour · Prix Femina

Nature humaine retrace, sur trois décennies, la vie d’un agriculteur, Alexandre, qui se retrouve face à un dilemme : céder aux exigences imposées par l’industrialisation de sa région et à la pression familiale ou rester proche de ses envies et de sa conception du métier de paysan.

Ce récit nous fait revivre les crises, les luttes et les événements marquants des années septante jusqu’à ce jour fatidique du 24 décembre 1999.
Il fait un parallèle passionnant entre deux mondes qui essayent de cohabiter et pose les vraies questions sur l’avenir de l’humanité. Ce roman terrien et sensible est un véritable coup de cœur !

Katia

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Nos espérances d’Anna Hope

Nos espérances est une histoire d’amitié entre Hannah, Cate et Lissa. Elles se sont rencontrées sur les bancs de l’école pour les deux premières et à l’Université pour Cate et Lissa.
L’autrice suit nos trois héroïnes de 1987 à 2018, avec des allers et retours dans le temps.
La consolidation de ce trio se passe, en 2004, dans une maison victorienne au cœur du quartier de London Fields où elles vivent en collocation. C’est le temps de l’insouciance : l’avenir leur appartient… Elles ont des centres d’intérêt communs : l’art, l’amour, l’activisme.

Les années passent, on se retrouve en 2010, et les trois amies ont trente-cinq ans. Elles sont insatisfaites, chacune à leur manière, plus de temps à perdre. Elles doivent faire face aux questions sociétales féminines : désir d’enfant, carrière, identité.

D’une époque à l’autre, l’auteure met en lumière le passé, entre rêves, désillusions, réconciliations, coups d’éclat, plaisirs partagés, affirmation de la féminité, déceptions, rendez- vous manqués.

J’ai adoré suivre l’amitié de ces trois femmes profondément contemporaines. Ce roman doux-amer, lumineux et profond m’a donné envie de lire les deux autres livres de l’auteure : Le chagrin des vivants, La salle de bal.

Katia

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L’Empreinte d’Alexandria Marzano-Lesnevich

« Ce qui m’a séduite dans le droit il y a si longtemps, c’était qu’en composant une histoire, en élaborant à partir d’événements un récit structuré, il trouve un commencement, une cause. Mais ce que je ne comprenais pas à l’époque, c’est que le droit ne trouve pas d’avantage le commencement qu’il ne trouve la vérité. Il créé une histoire. Cette histoire a un commencement. Cette histoire simplifie les choses, et cette simplification, nous l’appelons vérité. »

Stagiaire dans un cabinet juridique, Alexandria Marzano-Lesnevich se trouve confrontée au dossier de Ricky Langley, pédocriminel et assassin d’un petit garçon de 6 ans.  Face au visionnage des aveux du criminel, les convictions de l’autrice s’effondrent, et cette étudiante en droit farouchement opposée à la peine de mort est traversée par cette pensée « Je veux que Ricky meure ».  S’en suit une enquête dans laquelle elle va se plonger à corps perdu, pour tenter de comprendre, de trouver la bonne façon de raconter cette histoire tragique. A mesure qu’elle remonte dans le temps et les faits, son propre passé refait surface et un parallèle étrange se tisse entre l’histoire de Ricky Langley et la sienne. 

En mêlant enquête judiciaire et chronique familiale, l’autrice parvient à rendre une vision complexe de ce qu’est la pédocriminalité. Le pédocriminel est cet homme à l’air simplet dont on regarde la photo dans les journaux en espérant ne jamais avoir à croiser son chemin. Mais c’est aussi le grand-père qui montait chaque nuit dans la chambre de sa petite fille une fois la famille endormie. Lequel des deux est le plus monstrueux ? Quels parcours mènent ces hommes à une telle violence ? En brouillant les genres et les codes du policier, de l’écriture journalistique et du récit de vie, Alexandria Marzano -Lesvenich cherche des réponses à ces questions, tout en sachant qu’elle ne pourra jamais y répondre entièrement. Mais en racontant l’histoire de Ricky et la sienne, elle parvient à sortir de ce silence qui traverse les familles, et à « tendre la main au passé », pour poursuivre sa vie. 
Un livre particulièrement brillant!

Céline

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